Communication de crise : on l’évite ou on l’affronte ?
On entend souvent « Une bonne communication de crise repose sur une gestion structurée qui permet de minimiser les impacts négatifs sur une organisation ». Mais dans la pratique que fait-on ? Quand ? Comment ? Hodos partage ses conseils sur les étapes clés et les principes de la communication de crise au service d’organisations confrontées à des situations sensibles.
Anticiper pour mieux se préparer
Une veille multicanale permanente
« Ecouter » ce que l’on dit de votre organisation ou de votre secteur d’activité est essentiel pour identifier les risques qui peuvent avoir un impact plus ou moins important sur votre entreprise.
Les outils, du gratuit au payant, du simple au sophistiqué sont désormais très nombreux sur le marché de la veille stratégique.
Selon les moyens disponibles, un tryptique est cependant à envisager : les médias classiques, les réseaux sociaux et les plateformes d’IA. Ces trois canaux - l’IA générative ayant une place croissante dans ce dispositif - permettent d’analyser la perception d’une organisation ainsi que du secteur dans lequel elle évolue. En effet, si une marque n’est pas directement visée, il se peut qu’un scandale dans le secteur d’activité auquel elle appartient soit tout autant dommageable d’un point de vue réputationnel. On peut citer les entreprises de la petite enfance après le scandale des crèches privées ou encore les organisations caritatives après le séisme chez Emmaüs des révélations sur l’Abbé Pierre. Selon les secteurs et en particulier en BtoC, il est aussi conseillé d’étendre la veille aux services client ainsi qu’aux sites d’avis collaborateurs type Glassdoor, sans négliger les plateformes de communication interne (Slack, Spike, Ryver, etc.) qui donnent aussi le ressenti des équipes, premières ambassadrices d’une organisation. Des alertes en temps réel avec une analyse du ton aident à anticiper certaines crises et surtout à dimensionner le dispositif de communication à mettre en place lorsque la crise se déclare.
L’intégration des communicants dans la team de crise
Afin de ne pas être pris de court lors d’une situation sensible, il est avisé d’établir un process en amont et d’intégrer l’équipe en charge de la communication, ou à défaut ceux qui pourraient en être chargés (RH, CEO, DAF, etc.), dans la future cellule de crise. En effet, dès la situation ‘sensible’ déclarée, il est indispensable de mettre en place une stratégie de communication interne et externe impliquant des porte-parole, des messages adaptés à chaque public ainsi que les canaux pertinents à chacun.
« Réaliser des exercices en simulant une crise est une solution idéale mais rarement envisagée tant qu’on n’a pas connu de catastrophe ! Pourtant cela permet de tester non seulement le process théorique défini et la réactivité de l’équipe, mais aussi de gérer une future crise réelle sans céder à l’émotion ou la panique » conseille Sophie Ryan, Directrice Conseil chez Hodos et spécialiste de la communication de crise.
C’est la crise : quelle communication ?
L’évaluation des faits et l’ampleur des risques
La crise est bien là : qu’elle soit issue d’évènements internes (conflit social, problème de management, accident, défaillance, fraude…) ou externe (cyberattaque, catastrophe naturelle, crise sanitaire…), les situations peuvent être nombreuses. Même s’il est impossible d’imaginer et anticiper tous les scénarios que peut connaître une organisation, il est important de vérifier, dès les premières rumeurs ou informations, l’exactitude des faits connus pour en évaluer les différents impacts (réputationnels, économiques, juridiques, sociaux, etc.) afin de déterminer si la situation nécessite une communication immédiate, différée ou… aucune. « Notre conseil est généralement celui de mettre en place un dispositif de communication, même minime, afin d’adresser le sujet avec les parties prenantes qui pourraient ressentir une absence de communication comme de l’indifférence voire de l’incompétence », ajoute Sophie Ryan.
Transparence, empathie et responsabilité
Certaines situations où les informations sont partielles ou incomplètes ne permettent pas toujours d’apporter toutes les réponses attendues dès le début de la crise. Par exemple, lors d’un accident de grande ampleur (aérien, ferroviaire, environnemental ou autre) les informations tardent à être connues, analysées et confirmées même des semaines voire des mois après l’accident. Sans se précipiter sur une communication tout azimuts, il est important de faire preuve de transparence et d’empathie vers le public touché. Dire que « l’on prend connaissance des faits et que toutes les parties sont mobilisées sur le sujet » est toujours plus apprécié qu’un silence prolongé laissant place aux rumeurs ou aux spéculations. La transparence renforce la crédibilité. Il en va de même pour une attitude responsable et empathique. Minimiser ou dissimuler les faits n’est jamais payant. Le début de la crise du Covid et sa communication prudente a fini par se retourner contre plusieurs gouvernements accusés de « cacher la vérité » jusqu’à amplifier des phénomènes de complotisme.
Le plan de communication : la règle des 3QC
Pour mettre en place un plan de communication de crise rapide et adapté, il nous parait important de répondre à quatre questions fondamentales : Qui dit Quoi, Quand et Comment ?
Une fois identifiées les parties prenantes directes et indirectes touchées par la crise identifiées (clients, salariés, autorités, médias, etc.), il est primordial de désigner qui prendra la parole pour chaque public tout en définissant les messages, les canaux (réunions physiques, mail, téléphone, réseaux sociaux…) et le timing de communication. Si un seul porte-parole est souvent désigné pour les médias, il peut y en avoir des différents pour l’interne, les clients, les autorités, etc.
« La clé de voute de la communication de crise est d’assurer une cohérence globale sur le fond même si la forme peut différer », précise Sophie Ryan. Le ‘comment’ de notre règle ou l’adaptation du ton et le choix du canal les plus appropriés sont généralement issus de décisions prises en cellule de crise. A titre d’exemple, si une cyberattaque ou une fraude requièrent des explications détaillées aux collaborateurs d’une entreprise, une déclaration synthétisant la situation peut être fournie aux clients en proactif et aux médias en réactif par un document de Questions/Réponses approprié.
Retour à la normale : bilan et la suite ?
Une analyse post-crise n’est jamais un temps perdu, bien au contraire. Au-delà de la mesure quantitative et qualitative des impacts subis immédiatement et dans les semaines suivantes (baisse des ventes, perte de confiance, démissions…), l’évaluation de ce qui a fonctionné ou non est cruciale. « Même en cas d’impact contenu ou limité et/ou de retour à une activité ‘business as usual’, notre recommandation est de prendre un temps pour débriefer, à froid, et de mettre à jour le plan de crise ainsi que sa partie communication dans un process d’amélioration continue pour mieux affronter… la crise suivante » conclut Sophie Ryan.
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